Les changements profonds de notre mode de vie ont un impact important sur le fonctionnement de notre système immunitaire et modifie son équilibre. L’«hygiénisme » à outrance d’aujourd’hui favorise et augmente les maladies dites atopiques. La dermatite atopique ou eczéma atopique ou constitutionnel est l’une d’entre elles. Elle concerne 50 millions d’Européens dont près de 20 % d’enfants de moins de 10 ans avec un pic entre 3 et 5 ans. Dans certains pays d’Europe, elle peut atteindre 20 à 30% des nourrissons. Elle disparaît la plupart du temps avant 7 ans, mais un pourcentage d’environ 10 à 15 % persiste jusqu’à l’âge adulte. Elle reste le deuxième motif de consultation chez le dermatologue.
Mais qu’est ce que la dermatite atopique ou eczéma atopique ? Avoir une dermatite atopique c’est avoir un « terrain atopique », c’est à dire une prédisposition génétique à développer des allergies corrélées à certains facteurs de l’environnement qui favorisent l’apparition de poussées d’eczéma. Ce terrain atopique regroupe différentes maladies allergiques chroniques telles que l’eczéma, l’asthme, les allergies alimentaires et les rhinites-conjonctivites saisonnières. Les atopiques ont la capacité de présenter des réactions inflammatoires vis-à-vis de nombreux constituants de leur environnement cutané, aérien ou digestif. Le risque est d’autant plus grand chez les enfants lorsque l’un des deux parents et surtout les deux ont ce terrain atopique ; le risque est alors augmenté de 50 à 70%. Au cours de sa vie, on peut voir se déclencher une ou plusieurs manifestations allergiques. L’eczéma est souvent la première maladie symptomatique à révéler ce fameux terrain atopique. Ces manifestations disparaissent spontanément dans l’enfance dans la majorité des cas, mais peuvent reprendre à l’adolescence ou à l’âge adulte sous une forme différente.
En dehors de la dermatite atopique, il existe d’autres formes d’eczémas dont l’eczéma de contact, l’eczéma discoïde, la dermatite séborrhéique, etc.
Comment reconnaître la dermatite atopique ?
On voit sa peau devenir une peau de « crocodile ». Une appellation plutôt pertinente !
Cette apparence de peau en écailles est la conséquence d’une sécheresse extrême, avec la peau qui devient rugueuse, terne, grisâtre et qui s’épaissit. On dit que la peau se liquéfie. Par endroit, on voit apparaître une inflammation cutanée sur des zones localisées, avec des plaques rouges, fissurées qui peuvent devenir prurigineuses (plaques d’eczéma). Au stade aigu, des vésicules apparaissent pour devenir des squames. Ces plaques d’eczéma occasionnent également de fortes démangeaisons. La peau est donc hyper-réactive et irritable.
Que sont les éléments déclencheurs de la dermatite atopique ?
Les poussées d’eczéma sont favorisées par le contact avec des irritants comme certains savons, les détergents, les tissus rêches (laine), les agents allergisants (pollens, poils d’animaux, acariens), certains aliments (œuf, noix), un climat humide et fermé, la sueur, le stress, le manque de sommeil et les produits alcoolisés…
Certains traitements médicamenteux peuvent également déclencher des signes d’atopie.
Une multitude d’éléments déclencheurs contribuent donc à la survenue d’une poussée d’eczéma, surtout lorsque l’on a un terrain atopique.
C’est tout le système de défense immunitaire qui réagit avec la peau comme élément de réaction parmi d’autres symptômes qui peuvent se déclencher. Chez les atopiques, le revêtement cutané présente une anomalie en terme de perméabilité aux allergènes qui généralement sont bien tolérés par les personnes n’ayant pas cette prédisposition. Il est donc important d’éviter tout ce qui peut agresser la peau et éliminer les substances de l’environnement ou au moins en contrôler les effets pour ceux qui ont ce terrain.
Qui est touché par l’eczéma atopique ?
L’eczéma atopique est de 20 à 30% majoritairement une affection du nourrisson et de l’enfant. Souvent très localisée, elle dépend de l’âge des personnes touchées. Chez le nourrisson on la retrouve essentiellement au niveau du visage (front, joues, menton, cuir chevelu), sur le thorax, la face externe des bras et des cuisses. Dans certains cas graves, le nourrisson peut avoir une dematite atopique diffuse sur tout le corps. Chez l’enfant plus grand, les lésions se localisent essentiellement au niveau du cou, des plis du coude, des poignets et de l’arrière des genoux.
Chez 10 à 15% des adultes cette affection cutanée persiste, elle est rarement généralisée mais est souvent localisée sur le cou, le visage, le contour des yeux, les plis (coudes, genoux) et plantes de pieds. Selon l’âge, elle ne touchera pas les mêmes parties du corps. Mais l’eczéma atopique s’améliore puis disparaît au cours de l’enfance en alternant phases de poussées et de rémission.
La dermatite atopique chez l’enfant
On estime jusqu’à 20% de nourrissons touchés et 30% d’entre eux – entre un mois et deux ans – sont atteints par cette maladie ; des chiffres en constante augmentation. La fréquence de la maladie augmente avec l’amélioration du niveau de vie et donc du « tout hygiène ». La dermatite atopique débute presque toujours chez le nourrisson ou l’enfant en bas âge. Elle commence généralement vers trois mois, mais parfois dès les premières semaines de vie. Elle atteint alors le visage, de façon symétrique, avec une prédominance sur les joues et le menton. Souvent cet eczéma est corrélé à un terrain allergique associé à des problèmes digestifs.
L’eczéma est une dermatose récurrente chez tous les phénotypes en bas âge. La plupart des symptômes présents sont : prurit, contours émiettés, épaississement cutané légèrement squameux et démangeaisons. Mais ces modifications épidermiques peuvent apparaître légèrement différentes sur les peaux pigmentées notamment par de l’hyperchromie sur les peaux noires, métisses et asiatiques par rapport aux peaux caucasiennes.
La pigmentation de peau peut donc induire en erreur le diagnostic de l’eczéma sur les peaux dites ethniques lorsqu’on n’en reconnaît pas les symptômes.
On constate une recrudescence de dermatite atopique chez les enfants d’origine afro-caribéenne car leur peau est généralement très sèche en milieu tempéré voire xérosée, de plus, les habitudes culturelles de lavage et l’inadaptation climatique accentuent sans doute ce terrain atopique dans ces populations.
Les peaux « ethniques » et l’eczéma atopique
Les phénotypes « ethniques » (Asiatiques et Noirs) sont acclimatés à un certain type de conditions climatiques spécifiques et pour lequel leur organisme est adapté. En revanche, lorsqu’ils se retrouvent dans des climats occidentaux plus secs et froids, avec des variations de températures assez importantes, plus une eau calcaire, ils souffrent alors de desséchement cutané intense surtout au niveau du corps. Le film hydrolipidique est par conséquent altéré et l’eczéma en est une conséquence directe.
Sur les peaux noires et métisses, la déshydratation naturelle due à ce phénotype, le manque de soleil et l’eau fortement calcaire et ionisée des pays occidentaux favorise la xérose. La tendance au lavage excessif et au « décapage » de la peau par des gommages ou des techniques de lavage abrasif, accentue l’atopie plutôt récurrente sur ce type de population vivant en milieu occidental. Souvent sur les peaux noires et métisses l’hyperpigmentation intense qui suit les poussées d’eczéma persiste après la régression de la poussée. Il est donc fortement conseillé d’utiliser des méthodes de lavage et d’hydratation intenses sur ces phénotypes.
Sur les peaux asiatiques, surtout celle d’Asie du Sud-Est, l’hypersensibilité voire l’intolérance cutanée notamment au stress environnemental accentue l’altération de la barrière cutanée et donc l’hydratation de cette peau habituée à des climats humides. Cette altération en milieu occidental du film hydrolipidique augmente la sécheresse cutanée et donc amplifie les phénomènes d’atopie.
On peut donc dire que les peaux ethniques hors de leur contexte environnemental climatique originel ont une peau hyper-sensible et irritable. Les habitudes de lavage spécifique, une peau génétiquement sèche au niveau du corps, plus un terrain allergique environnemental et c’est l’apparition de poussées d’eczéma. Par conséquent, cette succession d’éléments accentue un terrain atopique en milieu occidental.
Comment soigner la dermatite atopique ?
Il n’existe aucun remède définitif contre l’eczéma. Par contre, aujourd’hui les avancées scientifiques sur le microbiome cutané permettent d’agir efficacement sur certains facteurs et symptômes de l’atopie comme « maintenir un certain équilibre à la surface de la peau en diminuant l’effet des agressions locales et en empêchant la prolifération d’une flore pathogène. Et grâce à une meilleure compréhension de l’écologie de la peau et du microbiome cutané on s’explique mieux le rôle de certains germes pathogènes comme le staphylocoque et les effets délétères de soins locaux trop agressifs (…) On savait qu’une bonne hydratation de la peau avait un rôle dans la prévention des poussées d’atopie, on sait maintenant qu’il faut y ajouter l’entretien du microbiome cutané », d’après le Dr Philippe Deshayes, dermatologue, consultant scientifique pour La Roche-Posay.
Bien que les patients puissent arriver à bien maîtriser l’eczéma et à vivre sans trop d’inconfort, c’est une maladie dont le traitement s’inscrit plus dans la durée et surtout dans la prévention. La prévention se retrouve essentiellement dans les habitudes de nettoyage, d’hydratation, de surveillance de son corps et d’une certaine qualité de vie. Elle est nécessairement un complément d’un traitement prescrit par le médecin lors de poussées d’eczéma et surtout pendant les périodes de rémission. On peut donc dire que des mesures simples de prévention et d’entretien de la peau peuvent permettre d’améliorer significativement l’efficacité d’un traitement donné.
Des règles simples de prévention
Les comportements à adopter pour éviter d’agresser la peau atopique sont :
- Limiter ou abolir les contacts irritants directs dus à des tissus (laine, synthétique), à certains cosmétiques (parfums, savons caustiques), aux détergents
- Être précautionneux dans l’hygiène avec un rinçage et un séchage en tamponnant la peau. Utiliser des nettoyants surgras ou des syndets.
- Éviter la stagnation de la sueur dans les plis cutanés (pieds, genoux, coudes, cou). Couper régulièrement les ongles pour éviter les lésions de grattage et la surinfection des lésions cutanées
- Avoir une hydratation régulière avec des produits émollients qui aident la peau à se protéger des agressions extérieures.
- Éviterles gommages abrasifs, les savons trop détergents et parfumés ainsi que les bains moussants qui sont souvent irritants ou mal tolérés.
Les traitements contre la dermatite atopique étaient jusqu’alors symptomatiques, ils reposaient sur l’apprentissage du bon usage du traitement et de la prise de dermocorticoïdes car cette maladie auto-immune est une maladie chronique.
Un traitement d’une semaine à 15 jours est souvent prescrit par le dermatologue et à appliquer sur les zones localisées lors de poussées d’eczéma. Il est arrêté dès que les lésions s’améliorent. La puissance des dermocorticoïdes prescrits par le médecin est variable d’un patient à l’autre. Elle est adaptée en fonction de l’intensité des lésions, de l’âge du patient et des zones du corps à traiter. Il est donc souhaitable de traiter tôt et efficacement une poussée suintante qui commence, plutôt que d’attendre. En effet, le traitement local répare la couche cornée et évite la surinfection microbienne.
Les dermocorticoïdes existent sous pommades ou crèmes. Les pommades sont plutôt réservées aux peaux sèches ou épaisses alors que les crèmes sont plutôt destinées aux endroits suintants et aux plis. La photothérapie est un des traitements conseillés en cas de dermatite atopique sévère ou résistante aux dermocorticoïdes. Pour des cas particuliers graves d’eczéma, un bilan allergologique peut être prescrit surtout lorsqu’il y a des troubles de la croissance chez l’enfant ou des cas de signes évocateurs d’allergie alimentaire ou respiratoire.
En dehors des poussées, il faut appliquer quotidiennement des crèmes émollientes (crèmes hydratantes et nourrissantes riches en lipides). Les soins d’hygiène doivent être doux avec des produits sans savon, ni parfumés pour ne pas trop dessécher la peau. Le bain ou la douche doivent être tièdes et ne pas durer plus de 10 minutes car la sécheresse de la peau est l’une des caractéristiques de la dermatite atopique. L’utilisation de crèmes émollientes ou hydratantes fait partie intégrante du traitement car elle permet de prévenir les poussées d’eczéma et l’irritation de la peau. Elles doivent donc être appliquées partout et tous les jours.
Le meilleur moyen de défense de la dermatite atopique, c’est la prévention. Pour l’instant, il n’existe aucun remède définitif contre l’eczéma. On traitait jusqu’alors les symptômes plus que les causes mais de récentes avancées notamment grâce au microbiome donnent de belles perspectives quant à la résolution des causes de la dermatite atopique. Surtout lorsque celle-ci s’avère handicapante socialement et psychologiquement pour certaines personnes touchées quand elle est importante. Et ce malgré une maîtrise à vivre sans trop d’inconfort avec la maladie la plupart du temps.
Par Leslie CAROMBO
This is very interesting, You are a very skilled blogger.
I have joined your feed and look forward to seeking more of your excellent post.
Also, I’ve shared your site in my social networks!